Changer de cadre pour changer d’élan : c’est au cœur des cuves du domaine Clavel, à Saint-Gervais, que le Comité Local École Entreprise (CLEE) du Gard rhodanien a tenu son assemblée plénière. Une manière assumée de rompre avec les habitudes institutionnelles pour ouvrir davantage la réflexion et marquer symboliquement une nouvelle étape dans cette coopération entre le monde éducatif et celui de l’entreprise.
Dès l’introduction, Anne-Sophie Gréselle, Proviseure nouvelle arrivée au Lycée Albert Einstein à Bagnols sur Cèze et co-pilote du CLEE, accompagnée de Julien Feja, représentant du monde économique et vice-président du Collectif, a posé le ton : celui d’une dynamique renouvelée, construite en partenariat étroit avec les élus du territoire – parlementaires, représentants de la Région et de l’Agglomération –, les chefs d’établissement, l’inspection académique, les entreprises locales, France Travail, la Mission Locale Jeunes et l’ensemble des acteurs engagés. Une assemblée que la co-pilote a décrite comme « enthousiasmante par l’énergie collective qu’elle porte ».
Un CLEE en pleine structuration pour renforcer le lien école–entreprise
Le CLEE, lancé en novembre 2024, n’est pas un simple comité : il se veut un véritable espace d’échanges pour faciliter la rencontre entre les établissements scolaires et les entreprises, mais aussi les acteurs économiques plus largement. Dans le Gard rhodanien, il s’inscrit dans une organisation à plusieurs niveaux, associant les équipes pédagogiques, le réseau territorial des écoles, collèges, lycées et campus, le Collectif présidé par Vincent Champetier, et le PPO, le Parcours Personnalisé d’Orientation à destination des élèves.
La coopération est également soutenue par le bureau des entreprises, animé du côté du Lycée Einstein par Corinne Bonneaud, qui travaille à maintenir vivante la relation entre l’école et l’économie locale. Son action consiste autant à développer les partenariats qu’à organiser les temps de rencontre et les immersions professionnelles, dans un territoire dont les filières restent souvent méconnues des jeunes.
Un bilan riche et une volonté d’élargir les horizons
Au cours de la plénière, Julien Feja est revenu sur l’histoire récente de cette structuration. Le CLEE s’est progressivement imposé comme une instance fédératrice, venant coiffer un travail déjà ancien avec le Campus des métiers et des qualifications d’excellence, porté auparavant par Corinne Nègre puis cette année par Claire Durand. Cette évolution a permis d’ouvrir la porte à des secteurs qui n’étaient pas représentés, notamment ceux situés en dehors de la filière nucléaire.
Plusieurs actions concrètes ont jalonné l’année : le Salon POP, devenu un vrai carrefour entre jeunes et entreprises ; le mentorat collectif mené en classe entière, prolongé par les déjeuners où des salariés partagent leur parcours ; ou encore les Rencontres Jeunes Entreprises, qui rassemblent chaque année près de quarante exposants et seront ouvertes en 2026, pour la toute première fois aux collégiens. L’objectif de ces initiatives, rappelé par les deux pilotes, reste constant : offrir à chaque jeune une vision complète des métiers du territoire, dépasser les représentations parfois figées, et ouvrir des portes vers des secteurs qu’ils n’envisageaient pas.
Un fil rouge jusqu’en 2030 : articuler et lier orientation , économie locale et transition durable
L’assemblée plénière a été marquée par l’annonce d’une nouvelle orientation stratégique. Anne-Sophie Gréselle a insisté sur la nécessité de replacer le CLEE dans un cadre plus large, celui du plan France 2030, qui invite à « mieux produire, mieux vivre et mieux comprendre ». Ce cadre national trouve un écho direct dans les 17 Objectifs de Développement Durable (ODD), qui couvrent des enjeux allant de la santé à l’éducation, en passant par l’égalité des sexes, la biodiversité ou l’innovation.
L’idée centrale est de donner un fil conducteur à l’ensemble des actions du CLEE, pour éviter d’ajouter une « feuille de plus au millefeuille », et au contraire articuler les projets autour d’une cohérence globale. Les participants ont d’ailleurs été invités à contribuer à cette réflexion en déposant, sur un mur thématique, des propositions d’actions en lien avec les ODD. Une manière de faire émerger des idées nouvelles tout en impliquant directement les acteurs présents.
La viticulture comme porte d’entrée vers des métiers méconnus
Le choix du domaine Clavel n’était pas anodin. La viticulture est une filière profondément ancrée dans l’identité du Gard rhodanien, mais qui reste paradoxalement peu connue et très genrée. Ce décalage a inspiré un nouveau projet pour l’année 2025-2026 : travailler sur la découverte des métiers moins visibles, participer à la féminisation de certains secteurs et inviter les jeunes à sortir des représentations dominantes.
La viticulture, racontée avec passion par Claire Clavel, dont l’exploitation familiale a été transmise « de père en fils, puis de père en fille », illustre parfaitement cette volonté. La vigneronne a décrit un métier exigeant, traversé par les crises mais porté par une passion intacte pour la vallée de la Cèze et pour l’appellation Saint-Gervais, encore trop méconnue. Sa présentation a offert aux participants un regard incarné sur une filière qui, malgré ses difficultés, continue d’attirer par la richesse de ses savoir-faire et la diversité de ses métiers.
Une signature symbolique et un engagement partagé
L’un des temps forts de la matinée a été la signature de la charte académique École–Entreprise, un acte officiel qui engage les deux univers à travailler ensemble, à renforcer les actions communes et à développer de nouveaux projets structurants. Cette signature, réalisée dans un lieu chargé d’histoire et de transmission, est apparue comme un symbole de cette volonté de tisser des liens durables.
L’assemblée s’est conclue par une visite du domaine, permettant de prolonger les échanges dans un cadre convivial. Les discussions ont montré un vrai désir collectif de construire des projets concrets, ambitieux et ancrés dans les réalités du territoire.
Rémi Fagnon