Bagnols-sur-Cèze : le lycée Albert-Einstein organise son premier forum “Corps et Accords” dédié à l’égalité filles-garçons et à l’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle
Une visite officielle a eu lieu ce mardi matin, en présence de Michèle Fond-Thurial, adjointe au maire de Bagnols-sur-Cèze, Pascale Bordes, députée de la 3e circonscription du Gard, et Laurent Savary, directeur de cabinet du président de l’Agglomération du Gard rhodanien.
Un projet porté par un groupe de travail intercatégoriel
Le forum est le fruit du travail du groupe égalité filles-garçons, réunissant enseignantes, agents, professionnelle·s de santé scolaire, référentes EVARS et professeures engagées, dont Cécilia Racaud, référente égalité et directrice de la revue du lycée Ours, ainsi que Nathalie Roux et Claire Durand, directrice du Campus des Métiers, qui coordonnent plusieurs dispositifs éducatifs.
L’ambition est claire : proposer une action forte, cohérente et structurante, destinée à l’ensemble des élèves de terminale, toutes filières confondues – générales, technologiques et professionnelles.
« Créer de la cohérence entre toutes les actions dans un parcours de vie », résume Nathalie Roux.
Une vision complétée par Claire Durand : « Cette cohérence, liée à de la récurrence, vise à installer des habitudes de vigilance, d’écoute et de respect. »
Des expositions et ateliers immersifs pour confronter les élèves aux réalités des violences
Au CDI, les élèves découvrent deux expositions marquantes :
- “Aurélie et Marie, les combattantes”
Réalisée par un lycée de Narbonne, cette exposition retrace le parcours d’Aurélie et Marie, survivantes de violences intrafamiliales et de violences au sein du couple. Elle s’accompagne d’un travail journalistique qui souligne qu’avec un encadrement solide, il est possible de se reconstruire.
- “Tenue Correcte Exigée” – Résidence d’artiste de 2019-2020
Ce projet mené avec deux classes de première proposait un travail sur l’image de soi et l’identité à travers le roman-photo. « On a scénarisé des histoires sans changer les paroles », se souvient une enseignante. Un outil puissant pour aborder sans détour les insultes, les stéréotypes ou les violences verbales à caractère sexistes.
Une série d’ateliers centrés sur le consentement et les situations réelles
Les élèves participent également à une série d’ateliers, dont plusieurs proposent une immersion dans des situations qu’ils pourraient rencontrer dans les années à venir :
• Projection du documentaire Elle l’a bien cherché : le parcours judiciaire de quatre victimes de viol, de la plainte au procès.
• Témoignages sur les violences sexuelles sous alcool, rappelant que filles comme garçons peuvent être victimes.
• Atelier “Consentement en milieu festif”: une mise en situation animée par les référentes EVARS, reproduisant le contexte des soirées étudiantes.
• Présentation des “5D”, cinq manières d’intervenir en tant que témoin : Distraire, Déléguer, Documenter, Dialoguer, Diriger.
« Une personne sur quatre intervient réellement en cas de harcèlement, principalement à cause de l’effet spectateur », rappellent les intervenants. Le forum vise justement à outiller les jeunes pour agir avec discernement, que l’on soit témoin ou victime.
Violences sexistes et sexuelles : des chiffres alarmants
Les échanges avec les élèves rappellent l’urgence du sujet :
• 54 % des violences concernent des mineur·e·s, dont plus de 80 % de filles.
• 43 % des élèves déclarent avoir déjà subi une violence sexuelle.
• Entre 230 000 et 277 000 victimes sont recensées chaque année en France.
• En trois ans, les agressions ont augmenté de 147 %.
« Ces crimes sont ignobles. Il est grand temps d’agir, et ce projet va dans le bon sens », a déclaré la députée Pascale Bordes.
Un établissement pleinement mobilisé
Durant les deux jours du forum, tout le lycée vit à l’heure de l’événement :
• repas violet au restaurant scolaire en référence à la couleur de lutte contre les violences faites aux femmes ;
• stands en accès libre avec des sages-femmes pour répondre anonymement aux questions des élèves ;
• opération “Café-copote” ;
• Affichage massif, rappel des numéros d’aide, distribution de ressources pédagogiques sur le site Ours.
Les élèves du chantier école, opérationnel depuis le 1er septembre et déjà complet jusqu’en mai, participent également à certaines réalisations logistiques et scénographiques.
Des soutiens multiples pour un projet structurant
Le forum bénéficie du soutien :
• de l’Agglomération du Gard rhodanien, notamment via le Campus des métiers ;
• de la Région, pour un projet journalistique vidéo sur le sexisme et l’homophobie vécus au lycée ;
• du Rectorat, qui appuie l’engagement des enseignants référents ;
• de l’association Colosse aux pieds d’argile, intervenue grâce à une subvention ;
• de partenaires bénévoles, notamment professionnels de santé.
L’exposition des 30 ans d’Orano, volontairement recentrée, par la direction de l’établissement, sur des portraits de femmes, complète également le parcours proposé aux élèves. À l’initiative de la proviseure, six portraits exclusivement féminins ont été sélectionnés parmi la trentaine de portraits mixtes initialement proposée dans l’exposition d’Orano.
Une démarche globale d’éducation à l’esprit critique et au respect
Le forum s’inscrit dans une volonté forte : éveiller les élèves à l’esprit critique, leur donner des repères clairs sur la loi, sur le consentement, et sur les limites à ne jamais franchir.
« Il est essentiel de rappeler les parties du corps que personne ne peut toucher sans consentement », rappellent les organisateurs.
Si, hier encore, la prévention ciblait principalement les filles, l’établissement défend désormais une éducation des garçons, indispensable pour faire reculer les violences.
“Corps et Accords”, un point de départ
En lançant ce forum, le lycée Einstein affirme une volonté de long terme. L’équipe espère en faire un rendez-vous récurrent, vecteur de prise de conscience et de prévention.
« Les élèves sont plus sensibles à l’affichage qu’à des messages numériques », constate Claire Durand, estimant que cette visibilité permanente peut modifier durablement les comportements.
Rémi Fagnon